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Brain Matin, l’ami des suavemente, besame

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QUE FAIRE EN CAS DE GUEULE DE BOIS ÉLECTORALE ?

Vous vous êtes réveillés avec des nausées et un sentiment de honte nationale ? Brain partage avec vous quelques gestes qui sauvent.

. Hydratez-vous en buvant les larmes des suppôts de Zemmour, il est où, le « vote caché » à son pépère ?

. Bouffez de la culture, en grande quantité, parce que ça retapisse l’âme et qu’avec les finalistes qu’on se paye, ce n’est pas sûr qu’elle survive bien longtemp​s

. Soulagez vos maux de têtes ​en évitant les « émissions spéciales » où le fond de la classe politique piaille pour revenir au premier plan (Copé, Dati, Cohn-Bendit : pourquoi leur donne-t-on encore la parole, sérieux ?)

. Reposez-vous, on va bientôt vous harceler pour que vous construisiez un barrage tels de petits castors républicains

. Surtout ne dormez pas pendant 5 ans, sinon c’est la démocratie qui tombe dans le coma

. Si votre foi n’est pas totalement flinguée, reprenez directement un shooter de politique : même si​ vous êtes écœuré et que​ ça paraît une mauvaise idée, il y a le second tour et surtout les législatives qui arrivent

Par F.L

JORDAN : ULTIME JUBILÉ

Acolyte des Sex Pistols, égérie de Derek Jarman et œuvre d’art autoproclamée, Jordan – décédée le 3 avril dernier – était au cœur de la fournaise punk dont elle a largement inspiré l’esthétique tout en y pulvérisant les normes de genre.

Un soir de 1990, Jubilee de Derek Jarman, premier film homopunk de l’Histoire, passait sur Channel 4, la chaîne anglaise expérimentale et très gay-friendly. C’est au milieu de ce foutoir baroque violemment anti-establishment que j’ai eu ma première vision de Jordan : l’anti-historienne au maquillage géométrique Amyl Nitrate se livrant à une parodie trash de Rule, Britannia! dans une scène inoubliable, désopilante, obscène, excitante – tout ce qu’était Jordan, décédée la semaine dernière à 66 ans. En 1978, Pamela Rooke, renommée d’après la Jordan Baker de The Great Gatsby, était depuis longtemps une figure centrale du punk britannique, une autocréation aussi sexuellement fluide – elle s’identifiait comme bisexuelle – que visuellement stupéfiante, autant transmutation de soi qu’armure d’autodéfense. Car la peur était sans doute ce qu’elle instillait le mieux : aux parents qui, craignant pour leurs gosses, menaçaient de la jeter du train, aux passants de King’s Road qu’elle arpentait en jupe transparente, jusqu’aux clients de SEX, la boutique de Vivienne Westwood et Malcolm McLaren où elle officiait en succube de latex noir. Personnification à elle seule de l’esthétique SM, porno et déviante du punk, elle a surtout contribué à visibiliser ses consœurs qui échappaient aux normes de beauté et de docilité féminines, de Poly Styrene à Ari Up et Viv Albertine.

Même au sein du microcosme punk londonien, Jordan jouissait d’un statut à part, sa pugnacité et son aversion pour le bullshit surpassant celles des Droogs queer du Bromley Contingent – Siouxsie Sioux, Soo Catwoman – ou des rockeuses plus classiques comme Chrissie Hynde (très impopulaire à SEX si l’on en croit son autobiographie, véritable Who’s Who alternatif). Dans le grand désordre idéologique manufacturé par McLaren et le désir de détruire les mythes d’une société toxique, autoritaire et cruelle, elle a flirté avec les codes de la nazisploitation, secondant les Sex Pistols en gardienne de camp kinky, choucroutée platine à la Myra Hindley, meurtrière d’enfants et visage du mal absolu. Incommensurablement plus menaçante que son incarnation prochaine par Maisie Williams dans Pistol, on imagine facilement le cauchemar qu’elle représentait dans un pays au bord du gouffre, traumatisé par le renversement des hiérarchies héritées de sa Majesté impériale. Peu de temps après, Lady Di, fraîche, rose et réservée, s’imprimait dans la conscience nationale : la réaction aristocratique tenait son icône, l’ordre hétéronormé le plus abusif était rétabli dans un raz-de-marée de froufrous et de brushings romantiques.

Dans la foulée de Jubilee, Jordan a connu une brève exposition médiatique : photographiée au festival de Cannes aux côtés de Bowie, en conversation avec Andy Warhol ou… Régine, tout en devenant manager d’Adam Ant puis du bassiste de celui-ci, Kevin Mooney, beau gosse du boys band Wide Boy Awake qu’elle a épousé. Puis, alors que le punk n’était plus qu’un lointain cirque et avait éclaté en une multitude de styles et de sons, c’est l’héro qui l’a rattrapée et forcée à tout lâcher en 1984, mec compris. Refusant de capitaliser sur son passé, elle ne réapparaissait que sporadiquement, à la faveur d’une avant-première, d’une expo sur les années mythiques ou d’une émission l’érigeant en pionnière féministe du rock. Toutes ces décennies, elle n’a fait que se consacrer à son immense passion, l’élevage de chats Birmans, à Seaford près de Brighton, là où elle avait grandi, là où ses rêves d’être ballerine s’étaient fracassés sous les pneus d’une voiture, là où sa légende avait débuté : le 23 mai 1973, Bowie passe en concert et, remarquant l’ado exubérante du premier rang, lui demande de lui offrir la boucle d’oreille en plumes qu’elle s’est confectionnée. La future Jordan, fan mais pas folle, commet alors l’inimaginable en un mot unique et décisif : « No ! »

Par David Le Guillermic.

 
 

CETTE ÉOLIENNE EN FIN DE VIE = NOUS POST-ÉLECTIONS

 
 
 

LE JDDL (LE JOURNAL DU DIMANCHE DE LUNDI)

En ce lundi de lendemain d’élection présidentielle, c’est un JDDL un peu spécial puisqu’on tente de vous faire le résumé le plus court possible de ce qu’il faut retenir du 1er tour. En bonus, l’aller-retour à 10 000 euros de Castex.

MACRON ET LE PEN AU SECOND TOUR

La participation : Finalement, le pays n’en a pas totalement rien à foutre de cette élection et la participation n’est pas aussi basse que ce qu’avaient estimé les instituts de sondages. Alors que l’abstention était donnée à 30%, c’est finalement 25 % de la population qui a préféré faire autre chose que de voter. C’est plus qu’en 2017 (22,2 %) mais moins qu’en 2022 (28,4 %).

Les scores des candidats : Avec trois candidats au-dessus de 20 % et les 9 autres sous 8 %, le premier enseignement est que Macron, Le Pen et Mélenchon ont ramassé 75 % des voix. Ça a claqué des genoux très fort en Macronie hier aux alentours de 17 heures quand les premiers scores que nous recevions en off de la part des sondeurs donnaient le Président à égalité avec Le Pen. Finalement, Manu bat son score de 2017 et termine à 27,6 %. Il aura en face de lui la candidate du RN, qui a obtenu 23,41 %, et porte donc l’extrême droite au second tour d’une présidentielle pour la 3ème fois. En troisième position avec 21,95 % des voix, Mélenchon a cru jusqu’au bout de la nuit pouvoir dépasser Marine Le Pen à la faveur des derniers dépouillements. Merci, Roussel notamment, puisque le candidat du PC obtient 2,31 %.

À retenir également, la fin des grands partis de la Ve République. Valérie Pécresse, (LR) termine sous la barre des 5 % (4,8 %) tandis qu’Anne Hidalgo enterre définitivement le PS avec ses 1,74 %. Elle fait presque deux fois moins que Jean Lassalle (3,2 %). Le candidat Vert, Yannick Jadot fait 4,4 % et a lancé une quête pour se faire rembourser ses frais de campagne.

Ah oui, Zemmour fait 7 %. C’était bien la peine de nous le mettre partout dans les médias depuis des mois.

Consignes de vote : Vous n’en avez rien à faire de ce que les candidats appellent à voter au second tour ? Avec Marine Le Pen dans le game, c’était pourtant un passage obligatoire hier soir. À gauche, Mélenchon n’appelle pas à voter directement pour Macron, mais a répété trois fois la même phrase: « Il ne faut pas donner une seule voix à Madame Le Pen ! » Yannick Jadot, appelle à « faire barrage à l’extrême droite » en votant pour Emmanuel Macron tout comme Fabien Roussel et Anne Hidalgo. Poutou n’a pas de donner de consigne. À droite, Valérie Pécresse donne une ligne claire : « Je voterai, en conscience, Emmanuel Macron pour empêcher l’arrivée de Marine Le Pen au pouvoir et le chaos qui en résulterait. » Zemmour appelle, lui, à voter Le Pen, mais affirme qu’il ne négocie pas son soutien. Jean Lassalle ne donne pas de consigne non plus.

Les premiers sondages pour le second tour : Dans les enquêtes réalisées hier soir après le 1er tour, Marine Le Pen se situe entre 46 et 49 %. Rien n’est fait pour Macron et il le sait.

CASTEX ET SON VOTE À 10 000 BOULES

Pas question de faire une procuration visiblement pour le Premier ministre ni de changer de bureau de vote : Jean Castex a accompli son devoir de citoyen hier à Prades. Les geeks qui adorent aller sur le site FlighAware se sont amusés à suivre cet aller-retour express en jet puisque Jeannot est arrivé à 8h30 et reparti avant 11 heures. Le coût du vol est estimé à 10 000 euros. Ça fait cher le vote.

Par Yann Quercia.

• LE TOUR DES MATINALES

Au menu des matinales : Roussel jugé en partie responsable de la troisième place de Mélenchon et Macron va enfin faire une vraie campagne.

ROUSSEL DANS LE VISEUR

Le Parti communiste avait soutenu Mélenchon en 2012 et en 2017. Mais cette année, le candidat Roussel a décidé d’aller seul jusqu’au bout, quitte à enlever des voix au candidat LFI. Et ce matin, c’est ce que lui reproche certains à gauche comme Adrien Quatennens, coordinateur de LFI : « Il nous a manqué 500 000 voix, c’est-à-dire trois fois rien. Oui, les voix de Fabien Roussel nous ont manqué, incontestablement. » Étonnamment, la charge la plus lourde vient de Ségolène Royal qui tape carrément sur Jadot et Hidalgo aussi : « Les candidats en dessous de 5 % n’ont pas été capables (de se rassembler), à cause de leur égo, de leur perspicacité, (…) d’avoir le sens de leur devoir, de comprendre que quand on est candidat à la présidentielle pour un courant politique, on est au service de cette histoire, ce n’est pas l’histoire qui est service de votre petit égo. » Vrai.

MACRON ENTRE EN CAMPAGNE

Alors qu’il a quasiment refusé de faire campagne au 1er tour, Emmanuel Macron trépignerait à l’idée de labourer le terrain pour combattre Marine Le Pen. Un déplacement par jour et trois grands meetings sont prévus d’ici les deux prochaines semaines. « Emmanuel Macron piaffe de faire campagne, il a envie de retrouver les Français » explique Bruno Le Maire ce matin sur RTL. Roselyne Bachelot enfonce quelques portes ouvertes sur BFM : « Une campagne du 2d tour n’a rien avoir avec une campagne du 1er tour, il va faire une campagne du 2d tour extrêmement différente, beaucoup plus frontale entre les deux programmes ». Lucide sur Inter, le porte-parole du gouvernement sait que rien n’est joué : « C’est une nouvelle campagne qui démarre, projet contre projet, valeurs contre valeurs. Je crois que rien n’est gagné et que la victoire, il va falloir aller la chercher. »

Par Y.Q.

SI C’EST UN PEU DUR CE MATIN, VOUS POUVEZ TOUJOURS VOUS CONSOLER AVEC LEURS TÊTES (VIDÉO)

La vidéo est aussi ici.

 
 

VOILÀ POUR QUI ON AURAIT DÛ VOTER

 
 
 

• BRAIN SÉRIE : CHRISTOPHE, FANTÔME DU PARADIS

ÉPISODE 1/9 : BOULODROME ET PRISE DE RISQUES

Il y a deux ans, l’être de lumière qui criait « Aline » et « Daisy » et savait porter la coupe mulet tout en conservant son sex-appeal nous quittait pour un ailleurs mystérieux sous nos yeux humides de chagrin. À l’occasion de l’anniversaire de la mort de Christophe, on tenait à vous faire repartager cette interview nocturne intime réalisée il y a presque 10 ans pour Brain.

Minuit et quart. J’arrive Boulevard du Montparnasse, au niveau du métro Vavin, une demi-heure avant le début de mon créneau d’interview. Christophe reçoit chez lui et ne travaille que la nuit. Je me dirige vers l’immeuble art-déco où le chanteur a installé ses pénates quand un coup de fil d’un de ses attachés de presse m’apprend qu’il y aura au moins trente minutes de retard. On m’invite à attendre en buvant du café et du vin blanc. Au rez-de-chaussée, le photographe Claude Gassian prépare une séance photo. L’attente s’annonce longue… Je monte et pénètre dans l’appartement-capharnaüm où a élu domicile l’artiste. Sa réputation de collectionneur n’est pas usurpée : des centaines de bibelots – beaucoup d’Americana – sont disséminés un peu partout ; un régal pour les visiteurs, un enfer pour la femme de ménage. Il y a effectivement du vin blanc et la nuit tourne à la dégustation. Il m’invite à le suivre dans le salon transformé en studio où il compose. La salle est plongée dans la pénombre mais éclairée par les dizaines de boutons et d’écrans du matériel, un véritable amoncellement de matériel audio. Ici, avec ses cheveux longs blonds et sa grosse moustache, il ressemble à un général Custer devenu Phantom of the Paradise. Nous nous versons deux grands verres de Pouilly. Dehors, le boulevard du Montparnasse est totalement silencieux…

Christophe : Il est 2h38…

Pas de problème. Tu fais toujours les interviews la nuit ?
En principe, je démarre un peu plus tôt, vers 20 heures. Cette année, j’ai décidé de changer mon cycle de vie, donc je ne dépasse pas, j’essaie de ne pas dépasser 4 heures du matin pour être debout à midi, midi ½, pour pouvoir aller jouer aux boules à 15 heures et rentrer tranquillement à 18h30 pour travailler.

Tu joues au Luxembourg ?
Oui. Je joue aussi aux Invalides. Je jouais avant au bois de Boulogne. Je joue avec des joueurs de haut niveau pour bien m’améliorer, tu vois, faire du sport quoi ! Quand on parle des boules, ça paraît être un truc touristique mais, en réalité, ça ne l’est pas du tout, c’est quelque chose de sérieux.

Tu joues depuis longtemps ?
J’ai commencé à jouer assez tôt parce que mon grand-père aimait beaucoup y jouer. C’est un peu lui qui m’a donné l’envie même si l’envie, ça vient tout seul… Mais c’est lui qui m’a fait découvrir la pétanque. À l’âge de vingt-huit, vingt-neuf, trente ans, j’ai commencé à jouer vraiment, à prendre conscience que je n’étais pas vraiment mauvais et que je pouvais m’améliorer. J’ai donc continué à jouer, comme on pratique un sport, environ quatre heures par jour, ce qui est quand même très épuisant. 

Quatre heures, carrément ?
Ah oui. T’imagines, quatre heures par jour, c’est lourd !

Et le fait que tu sois connu ne t’empêche pas de jouer normalement ?
Non. 

Les gens avec qui tu joues sont des potes ?
C’est tous des potes là-bas. Il y a toujours des curieux mais même au milieu de ces curieux, je me sens libre.

C’est une sorte de soupape ?
Cette année, ça va l’être parce qu’en règle générale, en cette saison, j’hiverne. D’habitude, je prenais à peine l’air. Je restais enfermé à travailler, travailler. Tandis qu’en ce moment, tous les jours, je fais quatre heures de chlorophylle, parce que de ce point de vue-là, le Luxembourg, c’est quand même pas mal. 

Je vois très bien où se trouve le boulodrome…
C’est là où je suis, sauf quand il pleut. J’y serai demain à 15 heures.

Et tu joues à Auteuil ?
J’y jouais à l’époque où il y avait encore Darry Cowl, mon copain. J’y ai joué jusqu’à 87 et puis j’ai arrêté. J’ai arrêté pendant très longtemps, j’ai repris là.

Et pourquoi ?
Parce que j’ai senti que je devais faire du sport et que c’est le sport qui me passionne, qui fait que je pense à pas grand-chose et qui me donne de l’énergie. En plus, j’imagine que ça ne fait pas de mal à ma tête et à mon corps. Ça leur fait du bien, surtout en ce moment… Le problème, c’est quand il pleut… Mais quand il ne pleut pas, qu’il fasse froid, chaud, on s’en tape complètement. Ce qui compte, c’est qu’il ne pleuve pas. Quand t’as froid, t’ajoutes ta doudoune alors que s’il pleut, on patauge dans la gadoue !

Et ça fait longtemps que tu habites ici ?
J’y habite depuis dix ans. 

Et pourquoi as-tu choisi de t’installer ici ?
C’est une question de hasard. À un moment, dans les années 2000, à l’époque où j’ai fait mon album Comm’ si la Terre penchait, j’habitais un petit hôtel dans le Ve, l’hôtel de Senlis. J’avais loué trois chambres pour pouvoir mettre mes affaires le temps de trouver quelque chose…Et puis, un jour, une dame d’une agence m’a dit : « J’ai un appartement qui vous plaira peut-être mais il est très bruyant. » C’était ici. J’ai craqué mais elle avait raison, c’est très bruyant. À cette heure-ci, ça va, mais quand je me couchais à 7 h ½, 8 heures, sans coton dans les oreilles, c’était pas jouissif. 

Mais tu te couches tard parce que tu bosses ?
Oui, oui. Je fais de la musique. 

Non, mais tu pourrais te coucher tard parce que tu fais la fête…
Ah, non ! Je n’en ai pas envie. Ca m’arrive, bien sûr. Une fois par semaine, je prends l’air, je vais voir les potes, ça me plaît quand même. 

Tu fais de la promo parce que tu vas donner des concerts l’année prochaine. Quelles seront les particularités de ces concerts ?
La particularité, c’est que je ne sais pas ce que je vais faire. Je serai sur un instrument que je ne connais pas du tout, le piano. Je vais prendre le risque de me jeter dans une aventure particulière c’est-à-dire de vivre un peu ce que je vis ici (il montre son studio, ndlr) quand je travaille, quand je cherche sauf que pendant ces concerts, je cheminerai à travers une liste de chansons que j’aurai choisie. Mais je pourrai en enlever, changer, parler avec les gens comme je parle avec des potes. Je veux faire quelque chose de pas du tout structuré ni formaté. Il ne faut donc pas que les gens s’attendent à voir un mec qui va chanter avec piano, synthés et guitare, les trois particularités sonores qui seront autour de moi. Il faudra qu’ils aient conscience qu’ils risquent de voir beaucoup de failles. Il faut qu’ils aient envie de me laisser de la liberté de ce point de vue-là, surtout avec cet instrument que je ne connais pas. Je le découvre un peu plus depuis cet été… Je suis loin d’être un pianiste et je ne connais pas la musique. Le piano, c’est pas mon art, moi c’est plutôt les synthés et le son. C’est un instrument très performant et il est préférable de connaître la musique quand on veut en jouer, même s’il y a de grands jazzmen qui ne la connaissent pas et qui ont appris le piano d’une autre manière. Je l’ai découvert en 2007, 2008…

Dans quelles conditions ?
J’en avais acheté un pour faire une table parce que j’avais besoin d’une table. J’ai donc commandé un piano en Hollande, c’était un Mechanik Bösendorfer, un petit piano court. Je l’avais acheté 2 ou 3.000 euros sur eBay et j’étais hyper-content parce qu’il était très, très beau, une œuvre d’art de 1920. Les mecs me l’ont installé et, au moment de partir, le Hollandais m’a dit : Avant d’en faire une table, vous feriez bien d’écouter le son qu’il a ! Je l’ai écouté et le type avait raison : j’ai été attiré par le son de cette machine. C’est le genre de son qui me donne envie de créer. Je l’ai donc fait restaurer par un type qui l’a complètement démonté, les mécaniques, les pieds, etc. La pièce avait été transformée en atelier, en manufacture de piano ! Et tout ça m’a donné envie de jouer, d’écouter des choses que je ne pourrai jamais produire avec un synthé. Ce n’est pas du tout le même aboutissement. Le piano, c’est vraiment un truc pour créer de la mélodie. Le synthétiseur c’est l’infini par le son… Depuis cet été, j’ai quand même voulu connaître les bases. Bon, faut que je travaille, que j’arrête d’essayer de me souvenir que telle note se trouve là parce que ça représente beaucoup de travail, surtout sur une heure et demie de concert. Lorsque je vois un la dièse majeur, il faut que je puisse le jouer instinctivement. Je suis donc dans cet apprentissage mais comme je mets très longtemps à apprendre, je ne sais pas si je serai prêt pour le mois de janvier ! C’est donc toutes ces demi-failles qui seront présentes dans ce concert où je quitterai peut-être les instruments pour parler parce que je n’aurai pas eu d’idée pour instrumenter. Ce sera donc quelque chose de surréaliste, un truc un peu décalé. 

C’est une grosse prise de risque, non ? Qu’est-ce qui t’a donné envie de prendre ces risques ?
C’est une grosse prise de risque, oui. Je ne me pose pas la question. C’est comme ça, ça fait partie de ma route, cette création du risque, ce travail sans filet. J’ai envie de vivre cette expérience osée où tout à coup, tu dis aux gens : « Bon, écoutez, si vous êtes venus pour écouter le concert d’un mec qui joue au piano ses chansons, vous êtes à côté de la plaque. Vous allez voir un mec qui sait à peine ce qu’il va faire… » Chaque ville sera dans la différence, j’espère pas dans l’indifférence. Ce que je ferai à Nantes, je ne le referai pas à Marigny. Si dans un endroit comme Marigny, Marseille ou Lyon, il y a une magie dimensionnelle, je sais que je ne pourrai pas la refaire le lendemain et que ça sera tant pis pour moi. Au contraire, je pourrai être complètement dans la faille. J’ai fait beaucoup de synthés. J’ai le temps de les travailler mais, sur scène, il faut imaginer des trucs. J’ai envie de faire intervenir des bandes sonores… C’est quelque choque que je gamberge, une structure sonore. Mettons qu’à un moment, quand je serai sur scène, ça me fera plaisir d’entendre un train que j’ai enregistré en 82 à Benidorm. J’aurai avec moi une boîte qui me permettra, en appuyant sur le 2, de jouer ce son. Il y aura des soirs où je le ferai, d’autres pas. Il faudra que ça ne soit pas fait gratuitement. Parfois, je n’aurai pas envie d’être au bord du précipice… C’est pour ça qu’il n’y aura que dix concerts ! Ca sera une sorte de one man show sauf qu’au lieu de faire le comique, je raconterai ma vie en musique. Un comique raconte des trucs qui font rire, des conneries, des trucs plus lourds… Parfois, ils font des trucs musicaux – je parle des très bons – et les gens rigolent. Et bien, ça sera pareil, je vais improviser, je ferai peut-être même le comique, tu vois ce que je veux dire ?

Demain dans Brain Matin, la suite de notre série Interview : Christophe, Fantôme du Paradis…

Par Olivier Richard // Crédit Photo : Lucie Bevilacqua.

 
 

MAIS FERME BIEN TA GUEULE, ASCENSEUR DE MERDE, TU CROIS QU’ON A ENVIE DE SOURIRE 

Photo : Eliza L.

 
 
 
 
 
 
 
 


Suicide – Frankie Teardrop

Enter The Void de Gaspar Noé rencontre le jeu Guitar Hero sur fond de bug inter-matrices épileptique. Un poil anxiogène, pas mal conceptuel et full of néons de La Foire du Trône et de la pharmacie de garde du coin qui te hantent plusieurs jours après atterrissage. Ce track inédit est extrait de la première compilation officielle de Suicide, Surrender, qui sort le 8 avril prochain sous le label Mute / BMG. Deep.


Monophonics – Warpaint

Morceau groovy illustré d’un clip qui montre le process d’un écrivain (forcément) alcoolique paumé, un mix entre Adrien Brody et Jack Nicholson dans Shining, shooté aux fantasmes d’une vie fabriquée de A à Z par un cerveau putréfié aux cendres de Gauloises. Sage Motel sort le 13 mai.

 


Rose Laurens – Zodiacale

La choucroute capillaire aux reflets de roues du zodiac pailletées s’appelle Rose Laurens, la voix est engagée comme la crinière, et la prod est signé Jean-Michel et Jean-Pierre. Ce titre de l’année 1983 est clairement à se passer en boucle tandis que le froid nous lâche lentement la main comme un amour impossible. Et oui, on dirait, mais cela n’est pas du Fishbach.

 


Jeanne Tonique – Not Your BB

GTA sauce IMVU enfermés dans un flipper tout secoué. À ne pas rater pour son agressivité du génie visuel et ce style musical à la frontière du rap torturé et de la frapcore rétro.
 

 
 
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Une newsletter écrite avec amour par Anaïs Carayon, Vanille Delon, Félix Lemaître, David Le Guillermic, Olivier Richard, Yann Quercia.

Correcteur : C.U.

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